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La monocorde « Djourkel » : un classique revisité par la jeunesse

Transmission d’un savoir ancien

Le lundi 16 octobre 2024, Mahamar Dicko, appelé aussi « Mayguida », a ouvert un nouveau chapitre au CFAIT : la fabrication du Djourkel, instrument monocorde emblématique du patrimoine peul et songhaï.

Composition de l’instrument

Mahamar a présenté les matériaux utilisés :

  • Courgette sauvage séchée pour la caisse de résonance,
  • Peau de chèvre ou de vache pour couvrir l’ouverture,
  • Racine de balazan séchée pour la manche,
  • Corde en nylon pour la note,
  • Petits clous et calebasse brisée pour le blocage.

Les élèves ont commencé par vider et polir la courgette, puis la recouvrir de peau, tendue et fixée avec du fil de peau. Ils ont ensuite percé deux trous pour faire passer le manche.

Reproduction en autonomie

Après avoir suivi la démonstration du maître, les élèves ont reproduit le même processus sur deux autres courgettes. L’étape de séchage a duré deux jours. Ensuite, les jeunes ont appris à raser la peau et fixer la corde. Un morceau de calebasse a été ajouté à l’arrière pour bloquer la corde, tandis que l’autre extrémité était attachée au haut du manche, avec ajustement par tension.

Au total, 3 Djourkel ont été construits pendant l’atelier.

Participants : 16 jeunes
Formateur : Mahamar Dicko
Dates : 16 au 18 octobre 2024
Lieu : CFAIT, Diré
Instruments fabriqués : 3 monocordes « Djourkel »
Matériaux utilisés : courgette sauvage, peau tendue, racine de balazan, calebasse, nylon

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La guitare traditionnelle « Koubour » : deux maîtres, deux approches

Un module en deux temps

La fabrication de la guitare traditionnelle malienne, localement appelée « Koubour », s’est déroulée en deux phases complémentaires au CFAIT, entre le 20 et le 24 octobre 2024. Cette session a réuni 18 participants sous la direction de deux maîtres artisans :

  • Amadoune Sidi, spécialisé dans la confection des caisses de résonance,
  • Aguissa Kouyaté, en charge du montage final, de l’accordage et de l’apprentissage musical.

Phase 1 : Le travail du bois avec Amadoune Sidi

Le premier jour, Amadoune s’est présenté avec un morceau massif de dattier sauvage, réputé pour sa résistance thermique et sa capacité de résonance. Devant les élèves, il a procédé à la taille de deux caisses :

  • Hachage extérieur à la hache moyenne pour obtenir la forme,
  • Creusage intérieur à la petite hache,
  • Rabotage manuel pour lisser la cavité.

Le deuxième jour, les élèves ont participé à la réalisation d’une troisième caisse sous sa supervision, mettant en pratique les gestes appris.

Phase 2 : Montage et finition avec Aguissa Kouyaté
Le 22 octobre, Aguissa a pris le relais.

Il a d’abord présenté les matériaux nécessaires pour compléter l’instrument :
Peau de vache trempée,
Cordes en nylon,
Trois anneaux de peau séchée (Garreau),
Deux manches en bois taillés de 50 cm,
Un morceau de calebasse pour le blocage,
Un couteau pour ajuster les pièces.

Après avoir tendu la peau sur la caisse, il a fixé le manche en la faisant passer sous le cuir, puis l’a bloqué avec la calebasse sculptée. Il a ensuite taillé des encoches pour fixer les Garreau à trois niveaux du manche (haut, milieu, bas). Les élèves ont pu manipuler et assembler leur propre guitare, encadrés par Aguissa.

Accordage et premiers sons

Le 24 octobre, les élèves ont terminé le montage des cordes. Le système d’accordage artisanal repose sur le glissement des Garreau le long du manche, à la manière des chevilles sur une guitare moderne.

Aguissa a conclu par une initiation à l’accordage et au jeu, avec des démonstrations simples et des exercices pratiques. 15 guitares traditionnelles ont été finalisées au terme du module.

Participants : 18 jeunes
Formateurs : Maîtres Amadoune Sidi et Aguissa Kouyaté
Dates : 20 au 24 octobre 2024
Lieu : CFAIT, Diré
Instruments fabriqués : 15 guitares « Koubour »
Matériaux utilisés : bois de dattier sauvage, peau de vache, nylon, calebasse, anneaux de peau (Garreau)

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À la redécouverte de la flûte « Koullou » avec Maître Sankaré

Une formation autour d’un instrument rare

Le mercredi 18 octobre 2024, le CFAIT a accueilli Maître Sankaré, l’un des derniers détenteurs du savoir-faire de la flûte traditionnelle « Koullou », originaire de la région de Godja, au nord de Diré. Cet instrument, peu connu des jeunes, est pourtant une pièce importante du patrimoine musical local.

Pendant deux jours, 19 élèves âgés de 16 à 19 ans ont participé à l’atelier de fabrication et d’initiation à la pratique de la flûte. Il s’agissait d’un module clé dans le programme du CFAIT, dédié à la sauvegarde des instruments oubliés.

Présentation des matériaux et méthodes

Avant de passer à la fabrication, Maître Sankaré a présenté les matériaux nécessaires :

  • Des tiges de bambou bien droites avec des nœuds réguliers (longueur : 40–50 cm),
  • Une lame de scie pour la découpe,
  • Des clous géants et une barre de fer chauffés au feu pour percer,
  • De la gomme arabique pour assurer l’étanchéité,
  • Des morceaux de calebasse utilisés pour manipuler la chaleur et caler les extrémités.

Chaque élève a pu manipuler les outils, guidé étape par étape : découpe entre les nœuds du bambou, perçage du trou d’entrée d’air principal, puis des quatre trous secondaires sur le bas de la flûte à environ 5 cm d’intervalle.

Fabrication assistée et apprentissage progressif

Sous la supervision de Maître Sankaré, les élèves ont été divisés en groupes pour reproduire le processus sur d’autres tiges préparées à l’avance. L’objectif : que chaque participant fabrique une flûte fonctionnelle.

Une fois les trous réalisés, la gomme arabique diluée dans de l’eau a été appliquée aux extrémités pour éviter toute fuite d’air. L’intérieur de la flûte a ensuite été rincé à l’eau, puis le bambou a été frotté au beurre de karité pour prévenir les fissures.

Le deuxième jour, les élèves se sont exercés à souffler dans l’instrument et à boucher les trous pour produire des sons distincts. Maître Sankaré a insisté sur la précision des gestes : « Ce n’est pas la force qui fait le son, mais le placement des doigts et le contrôle de l’air. »


Résultats et perspectives À la fin de la session, 16 flûtes ont été finalisées. Une majorité d’élèves est parvenue à produire des notes claires. Certains ont éprouvé des difficultés à moduler le souffle, mais ont montré des signes rapides de progression.

L’atelier a permis non seulement de transmettre une technique précise, mais aussi de sensibiliser les participants à l’importance d’un instrument encore utilisé dans certaines cérémonies ou pour accompagner le tambour.

Ce module a été très bien accueilli, notamment pour son aspect pratique et la clarté des explications fournies.

Participants : 19 jeunes
Formateur : Maître Sankaré
Dates : 18–19 octobre 2024
Lieu : CFAIT, Diré
Instruments fabriqués : 16 flûtes « Koullou »
Matériaux utilisés : tige de bambou, clous chauffés, gomme arabique, lame de scie, beurre de karité

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Naissance du premier instrument au CFAIT : Le tamtam traditionnel ‘Toubalé’

Une ouverture rythmée sous le signe de la transmission

Le mardi 10 octobre 2024, le Centre de Fabrication et d’Apprentissage des Instruments Traditionnels (CFAIT) a officiellement lancé son programme de formation par une cérémonie d’ouverture forte en symboles. Juste après les discours d’introduction, les 17 jeunes participants âgés de 16 à 19 ans ont fait la rencontre du premier formateur : Alassane Dicko, maître du tamtam traditionnel, reconnu dans la région de Diré pour son savoir-faire ancestral.

Ce fut le début d’un atelier d’exception, au cours duquel les élèves allaient fabriquer — de leurs propres mains — le tout premier instrument du centre : le toubalé, tamtam emblématique de la tradition songhaï.

L’histoire d’un instrument de rassemblement

Le toubalé, plus qu’un simple instrument, est un symbole d’unité et de parole collective. Autrefois utilisé dans les grands rassemblements villageois, il rythmait les chants, les danses, les appels à la prière et les cérémonies. Sa fabrication était transmise oralement, de maître à disciple.

Mais aujourd’hui, peu de jeunes connaissent encore ses secrets de fabrication. C’est pourquoi cette initiative du CFAIT prend tout son sens.

Du métal recyclé à la peau de bœuf : les composants d’un patrimoine

Sous l’œil attentif du maître Dicko, les élèves ont découvert les matériaux utilisés pour créer ce tambour traditionnel :

  • Deux bonbonnes de gaz recyclées servant de caisse de résonance,
  • Une peau de bœuf trempée pendant 24 heures,
  • Des cordelettes en peau découpée pour la fixation,
  • Une lame affûtée pour le rasage final,
  • Et une source de feu pour chauffer et accorder l’instrument.

Autrefois taillé dans du bois massif, le toubalé trouve ici une réinvention ingénieuse à travers le réemploi de matériaux contemporains, en conservant la logique acoustique d’origine.

Un atelier pratique, une pédagogie vivante

Pendant quatre jours (du 10 au 13 octobre), les participants ont été impliqués à chaque étape : découpe de la peau, perçage, fixation manuelle, exposition au soleil pour le séchage, puis rasage du cuir.

« C’est la première fois que je touche un instrument de chez nous, que je le construis moi-même… C’est comme découvrir un trésor caché dans ma propre culture », confie Amadou, 17 ans, l’un des apprenants.

Après deux jours de séchage, le maître Dicko a procédé à la chauffe au feu, qui permet de tendre la peau pour ajuster la tonalité. Le son obtenu est profond, vibrant, ancestral.

Une première vibration, une émotion partagée

Le 13 octobre, les deux tamtams finalisés ont résonné pour la première fois dans la cour du CFAIT, sous les regards émus des jeunes et des encadrants. Applaudissements nourris, sourires et larmes discrètes ont ponctué ce moment historique.

« Ce jour restera gravé, car nous avons redonné vie à un son que nos grands-parents connaissaient, mais que nous étions en train de perdre », explique Kadiatou, 18 ans, élève participante.

Un savoir ancré, un avenir à transmettre

Cet atelier n’a pas seulement permis de fabriquer un instrument. Il a permis à une génération de se reconnecter à son héritage, d’apprendre en pratiquant, et de prendre conscience de la richesse de ses racines culturelles.

Et ce n’est que le début. Les prochaines sessions porteront sur la flûte “Koullou”, le Djourkel, la guitare “Koubour”, le violon “Ndjarka” et bien d’autres instruments issus du patrimoine vivant de Diré.

Participants : 17 jeunes
Formateur : Maître Alassane Dicko
Dates : 10 au 13 octobre 2024
Lieu : CFAIT, Diré
Instrument fabriqué : 2 tamtams « Toubalé »
Composants principaux : bonbonnes de gaz, peau de bœuf, cordelettes en cuir, feu de chauffe